Le scoutisme aujourd’hui
«Où en est le scoutisme aujourd’hui, 115 ans après sa création?
Est-il toujours adapté à la jeunesse occidentale actuelle? à notre société si différente de celle du début du XXe siècle?
Et peut-il s’adapter à d’autres types de sociétés, ailleurs dans le monde?
L’étonnante vitalité du mouvement scout et son expansion dans le monde entier pourraient en elles-mêmes constituer une partie de la réponse à ces questions.
Car il y a en effet désormais des troupes et mouvements scouts dans au moins 216 pays et territoires dans le monde, représentant plus de 50 millions de scouts actifs, selon les recensements des organisations mondiales du scoutisme !
En réaliser un panorama complet s’avérerait tâche ardue, tant les mouvements sont divers, et en constante évolution.
Car si les principes pédagogiques tracés par Baden-Powell (loi scoute, engagement volontaire par la promesse, système des patrouilles, etc.) sont la base de tout groupe scout, de très nombreux mouvements de scoutisme différents ont été créés à travers le monde, adaptant ces principes éducatifs intangibles aux spécificités et volontés locales, qu’elles soient géographiques, climatiques, religieuses, ou autres, accentuant parfois davantage tel ou tel aspect du projet scout (service aux autres, secourisme et santé, nautisme, connaissance de la nature, «indianisme», instruction scolaire, production agricole…) en fonction des besoins particuliers des populations de chaque territoire.
Plus de 500 millions «d’anciens scouts» dans le monde
Mais au-delà de ces quelques différences, il existe donc aujourd’hui des mouvements scouts, appliquant la pédagogie de Baden-Powell, de quasiment toutes les nationalités et religions dans le monde.
Ces mouvements sont pour la plupart affiliés aux deux fédérations mondiales héritières des «Conférences Mondiales du Scoutisme» initiées par Baden-Powell (dont la 1ère eut lieu en Angleterre il y a 101 ans, et à laquelle 33 organisations scoutes nationales étaient déjà représentées): l’«Organisation mondiale du mouvement scout» (OMMS, ou WOSM en anglais), basée en Malaisie, à Kuala Lumpur, et l’«Association mondiale des guides et éclaireuses» (AMGE, ou WAGGGS en anglais), basée à Londres, pour la branche féminine du scoutisme.
Il existe cependant d’autres fédérations internationales, dont la principale en Europe, basée en France, à Château-Landon, est l’«Union internationale des guides et scouts d’Europe» (UIGSE).
Avec des chiffres en constante expansion, on peut aujourd’hui considérer que plus de 500 millions de personnes ont été scoutes dans le monde, dont certaines ont occupé des fonctions éminentes dans des domaines très variés (politique, économique, artistique, scientifique…) …
Nombre de décideurs ont ainsi témoigné au cours des ans de l’importance capitale qu’a pris leur expérience scoute pour faire d’eux les adultes qu’ils sont devenus.
En France, une image restaurée
Ces dernières années, la France n’a pas été en reste dans cette croissance constante du scoutisme!
Après une croissance fulgurante entre les deux guerres mondiales, et une apogée après la seconde (faisant passer les effectifs d’environ 15 000 vers 1914 à plus de 200 000 en 1946), les effectifs vont fluctuer avec une tendance à la baisse jusqu’à redescendre autour des 100 000 scouts au début des années 2000. Mais depuis lors, le mouvement s’est fortement inversé, et l’on en recense environ 180 000 en 2020 !
Un niveau record de participants depuis des décennies, pour un succès et un engouement nouveaux qu’ont soulignés de très nombreux journaux ces dernières années, contrastant fortement avec une décennie de défiance et de durcissements normatifs –depuis le début des années 2000– s’appuyant sur quelques accidents ou scandales abondamment commentés par les médias; et qui semblaient avoir écorné la bonne image dont bénéficiait jusqu’alors le scoutisme auprès de la population.
Outre l’inflation des normes sanitaires et de sécurité, l’un des problèmes récurrents aujourd’hui est même le manque de «chefs scouts» (des encadrants), qui met en péril nombre de troupes scoutes, et en oblige certaines à «recruter» des chefs sans expérience du scoutisme, mais possesseurs des fameux diplômes autorisant l’encadrement de mineurs (BAFA, BAFD…)!
Mais pourra-t-on alors encore parler de scoutisme, une pédagogie résolument basée sur l’exemple, et la transmission de savoir-faire des plus anciens vers les plus jeunes?
Un message et des valeurs qui forgent le caractère
Car le scoutisme n’est pas une simple «colonie de vacances-nature»! Il est un ensemble bien construit, longuement étudié et testé sur le terrain par son concepteur, Baden-Powell, pour favoriser l’épanouissement et le développement de jeunes banlieusards désœuvrés et sans idéal des cités ouvrières britanniques, en faire des adultes responsables, respectueux des autres, de la nature, et de Dieu, avec le sens du service au prochain.
Le scoutisme n’est pas qu’une liste d’activités plus ou moins spécifiques, mais il est porteur d’un message, de valeurs, qui forgent le caractère d’un futur adulte accompli !
e risque d’un si grand succès est alors de perdre cette vision initiale en déviant vers toutes sortes de «grandes causes» à la mode, ou d’activités diverses, tout en délaissant ce qui fait la richesse des méthodes pédagogiques si spécifiques du scoutisme !
Cela semble d’ailleurs arriver parfois car depuis quelques années, de nombreux propriétaires de «lieux de camp» ont fait remarquer que les lieux de camps leur étaient de plus en plus souvent rendus en mauvais état: pas nettoyés, abîmés… bien loin de la règle d’or en vigueur chez les vrais scouts: «le scout laisse son lieu de camp encore plus propre qu’il n’était en arrivant, et ne laisse derrière lui que des remerciements.»
Les jeunes d’aujourd’hui ne sont pas différents de ceux d’hier !
Et si l’on retrouve au niveau national le même foisonnement de mouvements et de sensibilités qu’au niveau international (une dizaine de mouvements scouts différents en France, dénotant autant de sensibilités différentes et de façons différentes d’aborder le même socle commun de la pédagogie scoute mise en place par Baden-Powell), il est aussi certain que tous ne suivent pas de façon aussi précise les traces laissées par le fondateur !
Alors où en est le scoutisme aujourd’hui, 115 ans après sa création? Est-il toujours adapté à la jeunesse d’aujourd’hui, à notre société si différente de celle du début du XXe siècle?
Oui ! Si l’on en garde tous les principes, qui en font toute la richesse, la spécificité !
Car nul doute que les jeunes d’aujourd’hui ne sont au fond pas très différents de leurs prédécesseurs des banlieues britanniques du début du XXe siècle… les ressorts profonds de la jeunesse, et ses aspirations, restent les mêmes !
Comme leurs devanciers, les jeunes d’aujourd’hui ont besoin de trouver un idéal de vie, des modèles qui les «tirent vers le haut», leur donnent le goût de l’effort en commun, et le sens des responsabilités !